Le
Jenbé ou
djembé
Sa forme de calice rappelle celle du mortier à piler. Sculpté en une
seule pièce, il est constituer d'un "pied" tronçonnique évidé dont la
cavité communique avec une caisse de résonnance. Sa taille est variable,
généralement de 50 à 60 cm de hauteur et de 30 à 40 cm de diamètre.
Sa partie supérieure est recouverte d'une membrane en peau de chèvre.
Le système de tension est réalisé grâce à un tressage de cordes en nylon
et la peau est maintenue à l'aide de trois cerclages métalliques.
Source : Radio
France
Le
jenbé (le tambour à une peau)
Bois, cordon industriel, fer H : 52,4
Le tambour
jenbé, dont il existe un petit et un
grand indissociablement joués ensemble, occupe une place centrale dans
la pratique musicale des Malinké, des Khassonké et des Peul sédentaires
du Wasulun, qui l'utilisent respectivement pour produire la musique
sokoninkun, liée à l'antilope mythique se trouvant à l'origine de l'agriculture,
la musique du nama (hyène) culte lié aux travaux des champs, la musique
du sigi, "Buffle", animal auquel les chasseurs vouent un culte, la musique
jaguawara (musique ayant la force d'obliger les gens à danser), la musique
proprement dite du jenbé.
La tradition musicale séculaire des Malinké est riche de trois principaux
instruments dont la réputation dépasse les frontières maliennes et africaines
: le "tambour-gobelet" à une peau, jenbé,
le "petit" xylophone, balanin de 15 à 19 lamelles accordées sur une
échelle heptatonique, la "harpe-chevalet" à 21 cordes, kora,
originaire de la Casamance.
Ces instruments déterminent en même temps les genres musicaux dont ils
sont l'élément central.
La musique proprement dite du jenbé se
fait à l'aide de trois instruments : le "gros jenbe", jenbe
ba, dont le joueur développe les rythmes complexes, joue le solo
et apporte un appui rythmique aux pas de danse; le "petit jenbé", jenbé
den, dont le joueur donne la base de l'accompagnement; et le
tambour cylindrique, dunun qui joue la
basse.
À cela s'ajoutent les battements de mains (des femmes), et un choeur
que dirige une chanteuse. La production de cette musique est généralement
liée aux récoltes (du fonio et du mil), aux fêtes religieuses musulmanes
(tabaski et ramadan), aux rites de passage (baptême, circoncision, mariage
et funérailles).
Chacune de ces occasions a ses rythmes, chants et danses caractéristiques.
Source
: Musée
National du Mali
Le
djembé
Un
instrument de légende
Instrument
à percussion, le djembé a une fantastique
légende presque inconnue. Même en Afrique, son berceau. Instrument traditionnel
africain, il a séduit et conquis l'occident où son commerce est très
florissant. Mais si les opérateurs économiques qui l'exportent font
facilement fortune, les fabricants tirent paradoxalement le diable par
la queue. C'est peut-être cela aussi la légende du djembé.
"Le
djembé est certainement l'instrument à
percussion le plus populaire du monde", pense Séga
Sidibé.
Une conviction partagée par beaucoup d'artistes sur le continent et
dans le monde. On comprend alors aisément que les Sénégalais, les Guinéens
voire des Gambiens disputent aujourd'hui sa paternité aux Maliens. Pour
Séga Sidibé, "Les Maliens
ont tellement négligé et délaissé le djembé
et méprisé les batteurs, à cause des préjugés sociaux, que de nos jours
on attribue, surtout les occidentaux, son invention à la Guinée, au
Burkina Faso, au Sénégal ou à la Gambie".
Selon des
historiens, des griots et des célèbres
batteurs comme Séga Sidibé et
François Dembélé, le Djembé
est "originaire du Mali".
Il a été inventé sous l'empire du Mali. Précisément à la période de
son apogée, sous Kankou Moussa, le successeur de Soundiata Kéita. Avant
le djembé, le "djidoundoun"
(une calebasse renversée dans une autre ou dans une tasse pleine d'eau
qu'on joue généralement avec des louches). Le rythme du djembé
est une reproduction de celui du djidoundoun.
C'est un jeune de Sakabari (Kita) qui l'a inventé. Certaines sources
précisent qu'il s'appelait Djimé dont la progressive déformation aurait
donné Djembé. Littéralement, il faut entendre
par djembé l'instrument de Djimé. Il est
en tout cas évident que le jeune inventeur s'est inspiré du traditionnel
mortier pour donner une forme à l'instrument recherché. Le tronc d'arbre
taillé fut ensuite recouvert par la peau tannée. Et il a petit à petit
peaufiné son travail jusqu'à avoir satisfaction au niveau de la forme
et de la sonorité. Le design du djembé
ne cesse d'évoluer au gré des créateurs et des artistes. Actuellement,
on distingue plusieurs formes de djembé.
Dun-dun, tamani,
chumba... sont inspirés de l'instrument à percussion.
La fabrication
du djembé se fait à la chaîne. Il y a d'abord
ceux qui sculptent les troncs pour leur donner la forme brute. Celle-ci
est par la suite polie et raffinée à l'aide du vernis ou du beurre de
karité. Elle est ensuite couverte de peau à l'aide du fer et des nœuds
de fils en nylon. "La peau de chèvre est particulièrement recommandée
parce qu'elle donne un cuir de meilleure qualité une fois tannée",
explique Mady Kané, un jeune fabriquant installé dernière la BIM, sur
la route de Djicoroni Para (à Bamako). Le métier s'apprend de
père en fils, ou par apprentissage chez un maître. Tous les grands batteurs
fabriquent leurs instruments. Certains ateliers peuvent fabriquer jusqu'à
cent djembés par jour.
Des millions et des millions de djembés
sont exportés d'Afrique particulièrement du Mali, du Burkina et du Sénégal
pour être vendus en Europe, aux États-unis et en Asie. Si les importateurs
réalisent de juteuses affaires, les fabricants, par contre, tirent apparemment
le diable par la queue.
Le prix du djembé ne cesse d'augmenter
sur le marché international. Paradoxalement, il baisse de façon vertigineuse
au niveau national. "Actuellement, beaucoup de gens font le boulot
uniquement pour survivre. Ils sont donc prêts à vendre leurs produits,
généralement de mauvaise qualité, à tous les prix. Le djembé
de meilleure qualité est vendue entre 25.000 (38,11 €) à 40.000
FCFA (60,98 €). Mais, certains le bazarde entre 12.500 FCFA (19,60
€) et 15.000 FCFA (22,87 €). Les clients ne se soucient pas
forcément de la qualité. Cette concurrence déloyale est en train de
ruiner les professionnels", expliquent Mady Kallé. Mais c'est loin
d'être la seule raison.
Beaucoup de fabricants se savent exploités par les commerçants exportateurs.
"Ils achètent nos produits à bas prix ici. Souvent, nous n'avons
pas plus de 1.500 FCFA (2,29 €) sur chaque djembé commandé. Et
sur les 1.500 FCFA (2,29 €) , il faut aussi payer les ouvriers
qui interviennent dans la fabrication. Finalement on se retrouve avec
des muettes", explique Badian Doumbia, un gros fabricant de l'atelier
situé derrière la Banque internationale pour le Mali (BIM).
A son avis, leurs principaux handicaps sont le manque de moyens financiers
pour faire face aux commandes et surtout le manque de relations d'affaires
à l'extérieur. "Nous avons toutes les difficultés pour obtenir des
crédits, même auprès des structures financières décentralisées comme
les caisses d'épargne et de crédit", ajoute-t-il avec un réel sentiment
de déception et de frustration.
Ils attendent aujourd'hui des autorités et de la Fédération nationale
des artisans du Mali (FENAM), dont ils sont presque tous membres, un
appui financier leur permettant d'honorer les commandes et surtout de
participer à des manifestations commerciales et culturelles internationales
afin de nouer des contacts avec de potentiels partenaires. En attendant
cet appui, un regroupement des artisans fabricants de djembé
peut leur permettre de résoudre certaines difficultés, comme celle de
la concurrence déloyale, et surtout se faire entendre et respecter.
Et déjà, il existe une expérience en la matière à travers "l'Association
des Jeunes artisans de Bamako-Coura, Badian Production", présidée par
Badian Doumbia. Mais force est de reconnaître qu'elle n'a pas encore
trouvé ses marques pour réunir tous les artisans du domaine.
Importante
source de revenus, surtout pour les opérateurs économiques qui exportent
le produit fini, la confection de djembé
crée également beaucoup d'emplois. Ainsi, Badian Doumbia affirme : "dans
mon atelier, j'emploie 20 à 50 personnes en fonction de l'importance
des commandes. Sans compter les jeunes à qui j'enseigne la profession.
Ce sont là autant de jeunes que nous éloignons du chômage, de l'oisiveté
et surtout de la délinquance juvénile. Ne serait que pour cela, nous
méritons le soutien et l'appui des autorités publiques".
Une doléance légitime qui mérite l'attention des autorités si elles
sont réellement soucieuses de la lutte contre la pauvreté par l'accès
à l'emploi et du rayonnement culturel du Mali.
Moussa
Bolly
Espèces
en dangers !
Le djembé est fabriqué avec du cuir et
surtout du bois. Et pas n'importe quel bois. Un travail de qualité exige
des bois tirés des arbres comme le linguè, dougoura, djala (caïcédrat),
guélen, sounsoun... Toutes des essences précieuses, exposées et de plus
en plus rares. Elles sont aujourd'hui très menacées à cause de l'augmentation
de la production du djembé en fonction
de la très forte demande internationale. Le ravitaillement des sculpteurs
de bois de djembé est une juteuse source
de revenus. Ce qui favorise une coupe sauvage des essences végétales
concernées.
A ce rythme de croissance de cette activité, elles risquent de disparaître
plutôt que prévu si rien n'est fait pour organiser leur coupe.
Il convient non seulement de sensibiliser ces vendeurs de bois, mais
aussi de faire des recherches pour essayer de remplacer ces arbres surexploités
par des essences moins menacées. C'est à ce prix qu'on pourra peut-être
éviter un drame écologique provoqué par le commerce du djembé.
M.B |