VISITEZ LE SITE AMKOULLEL
 

Un authentique rappeur

Amkoullel ! Ce nom ne vous est pas certainement étranger si vous êtes jeunes et adeptes du rap. Parce que son second album, "Surafin" est distillé et entraîne déjà une foule nombreuse sur les pistes de danse des night-clubs. Un opus très engagé dont la dédicace a eu lieu le vendredi dernier l'Hôtel Baobab. Qui est ce nouveau phénomène du rap malien qui tient tant les jeunes branchés en haleine ? Nous avons tenté de lever un tout petit coin du voile sur le beau gosse du Hip hop au Mali.

De son vrai nom Issiaka Bah, Amkoullel s'est imposé en un laps de temps comme un leader incontournable du mouvement hip hop malien. L'originalité, le jeune rappeur l'a dans son fabuleux beat et surtout dans le choix de ses thèmes aussi pertinents et dérangeants les uns que les autres. C'est surtout un jeune artiste très engagé. "C'est une motivation naturelle. Dj dans ma façon de vivre, je suis assez sincère et assez militant... L'exercice de l'art requiert avant tout de l'engagement pour exprimer ses opinions et ses convictions sociopolitiques...", dit-il pour justifier son combat. Un engagement qui se manifeste naturellement sur son premier album, "In faculté", sorti en août 2002.

"In faculté" est une oeuvre très mature, savamment mijote pour en faire un tube à succès. Et les fruits ont été à la hauteur des attentes. Parce que depuis sa sortie, Amkoullel ne quitte plus la scène à cause de nombreuses sollicitations. "Avant cet album, j'étais presque inconnu pour la majorité des Maliens. Mais, aujourd'hui, je jouis d'une certaine notoriété "In faculté" m'a hissé dans le gotha du hip hop malien", confesse le rappeur.
C'est aussi un album qui concrétise l'engagement du jeune peulh avec des titres très évocateurs et accrocheurs. L'introduction même, "Je suis", est en soi tout un art et tout un message qui définit pertinemment la forte personnalité du jeune rappeur. "Cette chanson, tout en tant une introduction mon album, est une façon de me présenter, en faisant un échantillonnage des différents styles que j'utilise dans mon flow (façon de rapper) et les différentes langues que j'utilise (le français, et le bambara). Elle véhicule aussi ma personnalité qui s'articule autour de l'idée de l'autonomie de la pensé, de l'identité : Je suis, parce que je ne singe personne ..."
"Mali kalanko" et "In faculté" (l'incapacité, l'existence virtuelle de faculté, avec le préfixe "in" pour l'inexistence d'une quelconque faculté ou Université ...) dans lesquels il critique les élèves et étudiants qui suivent aveuglement les leaders de leur association qui ne défendent pourtant que leurs propres intérêts. Il met en relief les lacunes du système éducatif et renvoi élèves, étudiants, parents, enseignants et autorités dos à dos par rapport à la persistance de la crise scolaire que le Mali traverse depuis plus d'une décennie. Africaniste convaincu, il est contre le mimétisme. C'est peut être pourquoi dans "A Guodon", il exhorte les mélomanes à danser comme ils conçoivent la musique et non comme dansent les autres. Pour lui, la danse et la musique sont universelles et chacun peut danser selon son inspiration.

De style raga hip hop, cette chanson à été faite pour les personnes qui aiment danser. Ses paroles disent : "lâchez-vous ! Dansez ! N'ayez pas honte de laisser éclater votre joie de vivre, il faut que le son pénètre ta peau !". Cette chanson fait également les louanges des soirées bamakoises où l'on s'éclate comme des fous ! Dans un autre titre phare mais ironique de l'album, "Les gens heureux", le très satyrique Amkoullel indexe "des imbéciles heureux, des insouciants et ceux qui ne réfléchissent pas par eux-mêmes parce que soumis aux intoxications de la communication de la société de consommation d'aujourd'hui. Ils ne sont capable d'aucun jugement critique constructeur sur la politique dans le pays et le reste du monde".

Le rassembleur

On retrouve pareil engagement dans sa seconde oeuvre, "Surafin" (pots-de-vin) dont le nom seulement est évocateur. Il y dénonce les discours démagogiques sur la lutte contre la pauvreté et la corruption. Il s'insurge également contre l'égoïsme et l'hypocrisie à toutes les échelles... Sur Surafin, l'Enfant peul se positionne surtout comme le "Rassembleur", le trait d'union entre le mouvement hip hop malien dont il a contribué à l'éclosion. Un album exceptionnel autour duquel il a tenté et réussi une expérience originale et salutaire : rassembler la crème du hip hop malien sur un projet musical.
Ainsi, il a autour de lui les Tata Pound, Diata Sya, Doudou Soul, Philo de Magic Black Men, Déné Issébéré, Michelle Traoré...
Un projet ambitieux qui dénote de la grande maturité de ce beau gosse qui s'est toujours imposé en rassembleur des poses au Mali. "J'avais envie de travailler avec les amis sur un projet et je suis parvenu à le faire. C'est l'essentiel", nous disait-il dans une interview publiée dans l'une de nos précédentes parutions (Reflet N° 369 du mercredi 3 septembre 2003). Ceux qui le connaissent, savent qu'Amkoullel s'est toujours battu pour l'unité de la famille du rap Malien. Et la réalisation de cet album est une première dont le succès ne fait l'ombre d'aucun doute. Amkoullel ambitionne surtout de poursuivre cette expérience, en dehors du cercle du rap, avec de jeunes artistes comme Doussou Bagayoko, Ramata Diakité, Amy Sacko, Rokia Traoré, Mamou Sidibé, Mariétou Diabaté, Batoma Sissoko...

Garçon exemplaire, Amkoullel n'oublie pas les racines de sa réussite, surtout sa mère à qui il a rendu un hommage émouvant dans son premier album "Sans ma mère, je ne serais pas aujourd'hui l'homme que je suis. Cet hommage est un appel au sens de la responsabilité tous ceux qui n'ont pas connu la présence d'un père et qui utilisent ce prétexte pour justifier leurs comportements de délinquant. C'est une chanson d 'amour pour ma mère et toutes les mères qui s'occupent de leurs enfants", affirme ce garçon poli, jovial et très timide.

L'intellectuel

La pertinence des thèmes d'Amkoullel et surtout la clarté de ces analyses sociales et politiques ne doivent pas surprendre pour qui sait qu'il est avant tout un intellectuel. Diplômé en droit, il est doté d'un impressionnant background qui sert de sève nourricière son engagement. Son ambition, c'est d'être un artiste complet. Ainsi, le concert dédicace de vendredi dernier a été le dernier spectacle donné par le bel enfant peul pour cette année. En, effet, il doit retourner dans quelques jours en France pour faire des études d'ingénieur du son. Il sera donc absent pendant un an. Cette formation sera un précieux atout lui permettant de mieux concrétiser l'espoir suscité par ses deux albums. Mais, l'idée de son absence toute une année rend déjà ses milliers de fans nostalgiques de son talent et de sa joie de vivre. Charmant et beau garçon, Amkoullel est actuellement l'incontestable coqueluche des jeunes branchés du pays, surtout après deux brillantes prestations aux côtés de deux rastaman leaders de la jeunesse africaine : Alpha Blondy et Tiken Jah Fakoly. Sa compagnie est très recherche par les mélomanes et surtout par les jeunes, charmantes et élégantes Bamakoises. Elles sont prêtes à tous les excès et toutes les folies pour l'approcher et le séduire. Heureusement que, malgré cet énorme succès, "le Petit Amkoullel" reste sage et garde la tête sur les épaules et les pieds sur ... scène !

Moussa Bolly

MAJ 20/02/2004