Salif Keïta |
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"Le bonheur n'est pas pour demain, il n'est pas hypothétique, il commence ici et maintenant. Ne nous laissons pas dominer par la violence, l'égoïsme, le désespoir. Ne sacrifions pas au culte du pessimisme. Relevons-nous. La nature nous adonné des cadeaux extraordinaires. Rien n'est encore joué pour notre continent, rien n'est encore perdu. Profitons enfin de ses merveilles. Intelligemment, à notre façon, à notre rythme, en hommes responsables et fiers de leur héritage. Bâtissons la terre de nos enfants et arrêtons de nous apitoyer sur nous-mêmes. L'afrique, c'est aussi la joie de vivren l'optimisme, la beauté, l'élégance, la grâce, la poésie, la douceur, le soleil, la nature. Soyons heureux d'en être les fils et luttons ensemble pour construire notre bonheur. " Salif Keita, décembre 2001 Moffou, c'est à la fois le titre du dernier album de Salif Keïta et le nom du club que le chanteur vient d'ouvrir à Bamako pour y promouvoir la scène musicale ouest-africaine. Dans l'un comme dans l'autre cas, le choix de ce patronyme n'est pas gratuit, il exprime un réel désir de retour aux racines, au continent Noir, au Mali, au pays des Bambara, Malinké et Soninké, à ses cultures, modes de vie, rites et traditions. De quoi contrarier les détracteurs de celui que l'on a surnommé le "Caruso africain", qui l'accusent de s'être beaucoup trop éloigné de ses origines. Certes, Sosie, paru en 1997, était entièrement consacré à la chanson française, et Papa, cru 1999 enregistré pour partie à New York, produit par le guitariste funk-rock Vernon Reid, ne lésinait pas sur l'électronique et les rythmes urbains. Mais à l'instar de Folon (1995), pétri de tradition mandingue, Moffou, cédé entièrement acoustique, est une œuvre d'inspiration cent pour cent africaine. Influences soul et pop mises en berne, Salif Keïta, voix céleste d'une clarté et d'une vigueur exceptionnelles, livre là l'un de ses enregistrements les plus frais, enivrants et authentiques. Peut-être
bien le sommet d'une carrière qui commence trente-quatre ans
plus tôt, en 1968, lorsque Salif,
20 piges et des poussières, quitte les rives du fleuve Niger,
les champs et le domicile familiaux pour tenter sa chance dans la capitale,
Bamako. Plutôt qu'un départ : une fuite, une rupture. Parce
que l'enfance et l'adolescence de Salifou Keïta,
venu au monde le 25 août 1949 dans le village de Djoliba (c'est
le premier nom du Niger), au cœur du Mali, n'ont pas été
une véritable partie de plaisir. Bamako,
fin des années soixante. La voix de Salif
Keïta, petit à petit, séduit les musiciens
de la métropole. A commencer par le saxophoniste Tidiane
Koné, leader du Rail Band
de Bamako qui fait les beaux soirs de l'Hôtel de la Gare (chaque
hôtel de la capitale possède son orchestre). En 1973, cédant sa place à un jeune chanteur guinéen encore inconnu - Mory Kanté -, Salif rejoint Les Ambassadeurs, autre formation de danse menée par le guitariste et chanteur Kanté Manfila. Etabli au Motel de Bamako, endroit essentiellement fréquenté par des Occidentaux, l'orchestre propose un répertoire éclectique et élargi, mordant sérieusement sur la pop anglo-saxonne, la chanson française et les rythmes afro-cubains. Premières tournées dans toute l'Afrique de l'Ouest puis expatriation pour la Côte d'Ivoire, en l'occurrence sa capitale, Abidjan, ville techniquement et commercialement beaucoup mieux équipée que Bamako. En 1978, Salif et les siens y enregistrent Mandjou, énorme réussite commerciale notamment due au titre du même nom. C'est là le vrai décollage de sa carrière internationale. La griffe, le son et le style Keïta sont déjà présents : orgue, claviers, guitares et saxophones se mêlent aux percussions et cordes traditionnelles, bribes de jazz, de rock, de funk et d'afro-beat redessinent les contours de rythmes et mélopées ancestraux. Décembre
1980 : Salif et Kanté
traversent l'Atlantique et se posent pour trois mois à New York.
Le temps de mettre en boîte les albums Primpin et Toukan, qui
susciteront le même enthousiasme que Mandjou. Mais Salif,
déjà, a l'esprit ailleurs. Il rêve de Paris. En 1987, Salif retrouve les studios pour la première fois en six ans. Produit par le Sénégalais Ibrahim Sylla, sur des arrangements de François Bréant et Jean-Philippe Rykiel, il publie Soro, manière de blues mandingue chanté en malinké (langue la plus importante du groupe Mandé). Un disque d'une pureté étincelante, son premier vrai chef d'oeuvre. Un carton ! En octobre, invité en Angleterre pour un concert organisé à l'occasion des 70 ans de Nelson Mandela, il se retrouve entouré de stars consacrées - Youssou N'Dour, Ray Lema - et se voit intégré au cercle restreint des maîtres de la " World music". S'ensuivront quantité de tournées aux quatre coins du globe. Ponctuées par les albums Ko-Yan (1988) et Amen (1991), placé sous la direction artistique de Joe Zawinul (parmi les invités : Wayne Shorter, Carlos Santana et son compatriote le claviériste Cheick Tidiane Seck), ainsi que plusieurs séries de concerts en compagnie du Syndicate du même Zawinul, héros de la fusion que Salif admire depuis les premiers albums de Weather Report, au début des années 70 : "Joe, je le rejoins quand il veut. C'est un frère, un immense créateur ! " Et puis encore Folon (1995), produit par le Béninois Wally Badarou (Grace Jones, Peter Tosh, Joe Cocker) et arrangé une nouvelle fois par Rykiel (sur la pochette : Nantenin, la nièce elle aussi albinos de l'artiste), troisième pure merveille du Malien, le francophile Sosie (1997) et le funky Papa (1999), tous deux cités plus haut. A
partir de 1997, Salif Keïta retourne
de plus en plus fréquemment au Mali. A l'heure où le continent Noir semble assailli par les maux les plus infects guerres tribales, ethniques et transnationales, exploitation éhontée des ressources naturelles par les multinationales, politique vérolée souvent liée aux luttes intestines pour le contrôle des gisements - or, pétrole, cuivre, diamants -, pollution, corruption des élites, surendettement, analphabétisme, misère, famine, maladies dévastatrices, extension affolante du sida, catastrophes naturelles à la pelle, massacre des espèces protégées, destruction de la forêt), Salif Keïta, lui, refuse obstinément de s'inscrire dans le fatalisme, de sombrer dans le défaitisme et de s'abandonner à l'apitoiement : "Le bonheur n'est pas pour demain, il n'est pas hypothétique, il commence ici et maintenant. Ne nous laissons pas dominer par la violence, l'égoïsme, le désespoir. Ne sacrifions pas au culte du pessimisme. Relevons-nous. La nature nous a donné des cadeaux extraordinaires. Rien n'est encore joué pour notre continent, rien n'est encore perdu. Profitons enfin de ses merveilles. Intelligemment, à notre façon, à notre rythme, en hommes responsables et fiers de leur héritage. Bâtissons la terre de nos enfants et arrêtons de nous apitoyer sur nous-mêmes. L¹Afrique, c'est aussi la joie de vivre, l'optimisme, la beauté, l'élégance, la grâce, la poésie, la douceur, le soleil, la nature. Soyons heureux d'en être les fils et luttons ensemble pour construire notre bonheur". Discours que traduisent les textes de Moffou, chantés en malinké et en bambara, qui en appellent à la joie, à l'amour et évoquent les douceurs et bienfaits de la vie. Joli cocktail d'ambiances que cette galette aux couleurs chatoyantes, à l'énergie hautement communicative et, surtout, au très fort pouvoir émotionnel. Thèmes
dansants, chaloupés et charnels, "des rumbas sauvages"
selon leur signataire (Baba, Madan, Moussolou, Koukou), côtoient
chansons douces et ballades (Here, Souvent ou l'incomparable Ana na
ming, merveille d'épure écrite alors que Salif
Keïta, séjournant seul sur une petite île,
rêvait d'une compagne imaginaire). |
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Salif Keïta | ||||||||||||||||||||||||||||||||
"Happiness is not for tomorrow, it’s not hypothetical, and it begins here and right now. Let’s fight against violence, selfishness and desperation. Do no sacrifice to the cult of pessimism. Stand up. Nature gave us extraordinary gifts. Nothing is done on our continent yet, nothing is lost. Let’s take advantage from these wonders, cleverly, in our manner, at our rhythm, like men responsible and proud of their inheritance. Let’s built something for our children and let’s stop feeling pity for ourselves. Africa is also the pleasure to be alive, optimism, beauty, elegance, grace, poetry, sweetness, sun, nature. Let’s be happy to be the sons of it and let’s struggle together to built our happiness". Salif Keita, December 2001 Moffou
is the name of the last album of Salif Keita
and also the name of the club he has opened in Bamako to promote the
West African musical scene. This name express a real desire to return
to the roots, to the black continent, to Mali, to the country of the
Bambara, Malinke and Soninke, to cultures, way s of life, rites and
traditions. It comes as an answer to those who accused him to have gone
too far from his origins. Maybe
the top of a career begun 34 years earlier when Salif,
20 years old left the banks of the river Niger and the familial fields
and house to try his chance in Bamako. More than a living, it was a
flight, a rupture. Salifou Keïta was
born on August 25th, 1949 in the village Djoliba (first name of the
river Niger) in the center of Mali and his childhood and adolescence
wasn’t pleasure at all. But, by the Keita, proud farmers from father to son, they claim to be from noble family, directs descendants of the brave and also feared Sunjata, small wretched prince unable to move with his legs who accomplished the unbelievable prowess to federate several enemies and formed at the beginning of the XIII century the powerful empire of Mali (the frontiers included at that time the present Senegal, Guinea, Burkina and part of Mauritania, Ivory Coast and Niger). An aristocrat does not sing! The family of Salif was unmanageable on this point. Music is exclusively for the griots. To choose this way is to transgress the ancestral rules and to exclude oneself from the community. Only one issue: leaving. Bamako, end of the sixty’s. Salif Keïta’s voice seduces slowly the musicians of the metropolis. The first was the saxophonist Tidiane Koné, leader of the band Rail Band of Bamako. Impressed by his incredible vocal capacities, Koné engaged the young man who became the real star of the band and led it to success. In 1973,
giving up his place to a young Guinean singer still unknown - Mory
Kante -, Salif rejoin the band “Les
Ambassadeurs”, another dancing band leaded by the guitar
player and singer Kanté Manfila.
Established at the “Bamako Motel”, place essentially frequented
by Occidentals, the orchestra proposed an electrical and enlarged repertoire,
with Anglo-Saxon pop, French songs and afro Cuban rhythms. First tours
in all West Africa then expatriation in Abidjan which is technically
and commercially much better equipped than Bamako. The label,
sound and style Keïta are presents:
organ, keyboard, guitar and saxophones join the percussions and traditional
strings and some jazz, rock and afro beat redraw the ancestral rhythms
and melodies. In 1987, Salif returns in the studios for the first time since six years. Produced by the Senegalese Ibrahim Sylla, on the arrangements of François Bréant and Jean-Philippe Rykiel, he published “Soro”, kind of Mandingo blues sung in Malinke (most important language of the Mande); a sparkling pure album, his first masterpiece. In October, as invited in England for the 70 years old celebration of Nelson Mandela, he found himself surrounded by consecrated star such as Youssou N'Dour, Ray Lema and is integrated into the restricted circle of the masters of “World music”. Thereafter
came a lot of tours around the world. These tours were punctuated by
the albums Ko-Yan (1988) and Amen (1991), placed under the artistic
direction of Joe Zawinul (among the guest:
Wayne Shorter, Carlos
Santana and his compatriot the keyboard player Cheick
Tidiane Seck) and by several concerts made with the syndicate
of the same Zawinul, hero of fusion whom
Salif admired since the first albums of
Weather Report at the beginning of the
seventy’s: “I can rejoin Joe any time I like. He’s
like my brother, a huge creator!” and then Folon (1995),
produced by the Beninese Wally Badarou
(Grace Jones, Peter
Tosh, Joe Cocker) and arranged by
Rykiel (on the album appears Nantenin,
the albino niece of the artist), third pure wonder of the Malian, the
Francophile Sosie (1997) and the funky Papa (1999), both quoted above. Panafrican
in soul, convinced antiracist, militant of peace, great admirer of Nelson
Mandela, Salif Keita is also a generous
artist who has always done his best to create a footbridge between Africa
and the rest of the world who approach today a new turning point of
his life: the one of maturity. This push him to invest more in the development
of his country, to encourage the expatriates, to protect and promote
the local artists and to act in order to make the African music emancipate
and be produced on the original land and not only in Europe and united
states. Speeches
translated by the lyrics of “Moffou”, sung in Malinke and
in Bambara, which call up to joy, love and evoke the sweetness and the
benefits of life. This new album is full of colours, energy and emotion.
A lot of excellent musicians took part in the operation; among them the Guinean guitar player Djelly Moussa Kouyaté (whose next album “Sebe Alaye” is awaited impatiently) and the incredible Kante Manfila (acoustic guitar), both companion of Salif for so long. Then, the voice of Cesaria Evora in Yamore, the accordion of Benoît Urbain, the harmonica, the marimba and the steel-drums of Arnaud Devos, the percussion of the crushing Mino Cinelu, the flutes of David Aubaile and about traditional instruments: calabashes, tam tam, congas and djembé by Mamadou Kone, Adama Kouyaté, Souleymane Doumbia and Drissa Bakayoko, the lutes of Jean-Louis Solans and Mehdi Haddad (Ekova), les n'goni (small guitars) of Sayon Sissoko and Harouna Samake. The whole produced by Jean Lamoot (Noir Désir, Alain Bashung, Brigitte Fontaine, Mano Solo…). Wonderful casting for an album of dream. |
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P
04/03/2004 |